AFGSU et responsabilité juridique : ce que les infirmier libéraux doivent savoir
Orion Santé

AFGSU et responsabilité juridique : que dit la loi ?
Lorsqu’on parle de responsabilité juridique, la première question à se poser est simple : sur quoi repose-t-elle vraiment ? Dans le cadre de l’exercice libéral, c’est le Code de la santé publique qui fixe les règles. Et parmi elles, figure l’obligation de formation aux gestes et soins d’urgence. En clair, si vous intervenez auprès de patients, vous devez être en capacité de réagir face à une urgence vitale. Et ça, ça passe par l’AFGSU.
Le texte qui encadre cette obligation est l’arrêté du 30 décembre 2014, modifié en 2019. Il impose que tout professionnel de santé travaillant seul soit à jour de sa formation AFGSU niveau 2. Et ce n’est pas anodin : en cas de contrôle ou d’incident, l’absence d’attestation peut être interprétée comme une défaillance professionnelle. C’est ici que la responsabilité juridique entre en scène.
Mais attention, la loi ne parle pas uniquement de formation. Elle évoque aussi la notion d’obligation de moyens. Cela signifie que vous devez tout mettre en œuvre pour assurer la sécurité du patient, sans pour autant être tenu à un résultat garanti. Un bon exemple ? En cas d’arrêt cardiaque, pratiquer un massage dans les règles de l’art ne garantit pas la survie. Mais ne rien faire ou mal faire engage directement votre responsabilité.
La loi évolue, et avec elle, les attentes vis-à-vis des soignants. C’est pourquoi on assiste à un renforcement du cadre légal autour des formations d’urgence. Une tendance accentuée par les chiffres : en France, plus de 50 000 arrêts cardiaques surviennent chaque année (Santé publique France). Or, lorsqu’un témoin pratique les bons gestes, le taux de survie peut quadrupler, passant de 7 % à 30 %.
Responsabilité juridique : quels risques en cas d'erreur ?
En cas d’urgence, chaque seconde compte. Mais chaque geste compte aussi... juridiquement. Alors, quelles conséquences en cas d’erreur ? La responsabilité juridique d’un professionnel peut être engagée sur trois plans : civile, pénale et disciplinaire. Et non, ce n’est pas une question réservée aux hôpitaux : les praticiens libéraux sont tout autant concernés.
La responsabilité civile intervient lorsqu’un dommage est causé à un patient. Il peut s’agir d’un geste mal réalisé, d’une absence d’intervention ou même d’un oubli. L’indemnisation repose alors sur la faute commise, le préjudice subi et le lien entre les deux. Ce type de dossier est souvent traité par les assureurs, qui exigent que le professionnel soit formé et à jour dans ses compétences, dont l’AFGSU.
La responsabilité pénale, elle, est plus lourde. Elle est engagée lorsqu’il y a manquement grave, négligence ou imprudence. Refuser d’intervenir sur une détresse vitale sans raison valable, ou ne pas maîtriser les gestes de premiers secours malgré leur caractère obligatoire, peut entraîner des poursuites. Dans certains cas, une peine d’emprisonnement peut être prononcée, même si cela reste rare.
Enfin, la responsabilité disciplinaire est liée à l’éthique et au code de déontologie. Elle concerne notamment le non-respect de l’obligation de formation. Les conseils de l’ordre peuvent prononcer un blâme, une suspension, voire une radiation. C’est pourquoi il est crucial de rester à jour, non seulement pour vos compétences, mais aussi pour votre protection.
Et au cœur de tout cela, l’AFGSU joue un rôle central. Elle atteste que vous êtes capable de réagir dans les règles de l’art face à une situation critique. Ce n’est pas un bonus sur votre CV. C’est un bouclier juridique.
AFGSU et responsabilité : quelle obligation de formation ?
L’AFGSU niveau 2, vous en avez entendu parler. Mais concrètement, est-elle vraiment obligatoire ? Et pour qui ? La réponse est oui, dès lors que vous exercez une activité impliquant des soins directs à une personne, que ce soit en cabinet ou à domicile. Cette obligation n’est pas nouvelle, mais elle s’est renforcée ces dernières années.
La formation dure 21 heures et couvre tout le champ des situations urgentes : arrêt cardiaque, détresse respiratoire, hémorragie massive, accidents domestiques, intoxications... Elle intègre aussi des modules NRBC (nucléaire, radiologique, biologique et chimique), souvent méconnus, mais indispensables en cas d’alerte exceptionnelle.
Mais l’essentiel, c’est qu’une attestation AFGSU n’est valable que 4 ans. Passé ce délai, un recyclage est nécessaire pour rester conforme à la réglementation. Et ce détail a toute son importance : un professionnel qui n’a pas actualisé sa formation pourrait voir sa responsabilité engagée s’il intervient avec des gestes obsolètes.
En parallèle, certaines assurances professionnelles exigent la preuve d’une formation AFGSU à jour pour garantir la couverture en cas de litige. Le lien est donc direct entre obligation de formation et protection juridique. Ce n’est pas un simple rappel à l’ordre : c’est un levier de sécurisation, autant pour vous que pour vos patients.
Que faire pour limiter votre responsabilité juridique ?
La responsabilité juridique, c’est aussi une question de prévention. Et bonne nouvelle : il est possible de la limiter efficacement. Le premier réflexe ? Se former régulièrement. Une AFGSU récente, c’est la garantie que vous connaissez les protocoles les plus actuels. Mais il faut aller plus loin.
Être bien équipé sur le terrain est essentiel. Par exemple, avoir une trousse d’urgence complète, un défibrillateur automatisé externe (DAE) si nécessaire, et surtout savoir s’en servir. C’est une chose de posséder le matériel ; c’en est une autre de le maîtriser.
Autre point-clé : documenter ses interventions. Prendre quelques minutes pour noter les gestes réalisés, les signes observés et les décisions prises peut faire toute la différence en cas de litige. Cela montre que vous avez agi dans le respect de votre obligation de moyens. Ce n’est pas une assurance tous risques, mais une précaution utile.
Enfin, restez informé. Les textes évoluent, les recommandations aussi. Suivre une veille régulière (via les sites officiels ou des sessions de formation continue) vous permet d’anticiper les changements. Et c’est souvent cette capacité d’adaptation qui fait la différence entre un geste maladroit et un acte sécurisé.
AFGSU et consentement : quel lien avec la responsabilité ?
On parle souvent de gestes d’urgence, mais un point est parfois oublié : le consentement du patient. Et pourtant, il est au cœur de la responsabilité juridique. Même en situation critique, on ne peut pas tout faire sans l’accord explicite ou implicite de la personne. Sauf cas d’inconscience ou de danger immédiat, bien sûr.
Demander l’autorisation, expliquer rapidement l’intervention, rassurer… Ces actions ont autant de valeur que le geste lui-même. En cas de plainte ou de litige, une absence de consentement peut être interprétée comme un abus, voire une agression. Ce n’est pas théorique : plusieurs décisions de justice ont déjà retenu cette notion pour condamner des actes pourtant réalisés dans un but thérapeutique.
L’AFGSU inclut justement un module sur l’éthique et la communication en urgence. Pourquoi ? Parce que savoir-faire, c’est aussi savoir-dire. Mettre un garrot, faire un massage cardiaque ou administrer un traitement d’urgence ne s’improvise pas… même si vous en avez la compétence technique.
À travers cette formation, on apprend aussi à lire les signaux non verbaux, à distinguer les situations où l’on peut agir sans consentement explicite, et à rédiger ensuite une traçabilité claire. C’est là que se joue une partie invisible, mais cruciale de votre pratique : agir efficacement, tout en respectant les droits fondamentaux des personnes.
Et au final, c’est cela aussi la responsabilité juridique : un équilibre permanent entre urgence, compétence et éthique.
Sources : Légifrance, Santé publique France, ANCESU