La cotation en pratique est le nerf de la guerre pour les infirmiers libéraux. Bien sûr, tout IDEL connaît la NGAP et l’importance de coder correctement ces soins. Mais sur le terrain, les difficultés apparaissent dès qu’on touche aux actes complexes, aux cumuls ou aux forfaits BSI. L’Assurance Maladie a recensé plus de 40 millions d’euros d’indus chez les IDEL en 2023, preuve que la marge d’erreur est grande. Alors, comment appliquer la cotation sans fausse note ? Quelles règles de cumul sont réellement opposables ? Quelles majorations peuvent s’ajouter sans risque ? Et que se passe-t-il lorsqu’une erreur est détectée plusieurs années après ?
Qu’est-ce que la cotation en pratique ?
Dans la théorie, la cotation en pratique consiste à traduire chaque soin en un acte NGAP, valorisé selon sa lettre-clé et son coefficient. Mais dans la pratique, tout IDEL sait qu’une cotation correcte ne dépend pas seulement du geste technique : elle s’appuie sur le contexte de réalisation et la logique de la nomenclature.
Un AMI 1 pour une injection intramusculaire vaut 3,15 €, mais ce tarif n’est valable que si l’acte est isolé. Si l’injection est réalisée lors d’une tournée comportant un pansement complexe (AMI 4), elle passe en AMI 1 à demi-tarif (1,58 €).
Autre exemple : un pansement lourd (AMI 4) peut sembler simple à coter. Mais si le patient présente plusieurs plaies, le premier pansement est coté à taux plein, tandis que les suivants sont réduits ou intégrés, selon la règle de l'article 11b. Dans ce cas, la pratique diffère radicalement de l’intuition clinique de l’IDEL.
💡 Le formateur averti rappelle donc que la cotation est avant tout un acte réglementaire. Une erreur ne remet pas en cause le soin, mais elle impacte directement la rémunération et expose à un contrôle. 
Pour revoir les cotations des soins les plus courants retrouvez notre article sur : 
👉 Les actes courants et leur tarification dans la NGAP infirmière 🔗
Comment appliquer correctement la NGAP ?
Appliquer correctement la NGAP en pratique suppose de maîtriser non seulement les cotations elles-mêmes, mais aussi leur articulation avec la prescription et les forfaits.
Prenons le cas d’un patient diabétique sous insuline. L’injection quotidienne se cote AMI 1, mais si le patient est intégré dans un BSI, cette injection obéit aux règles de cumuls avec le forfait journalier et se cote à demi. Facturer les deux à taux plein entraîne un indu automatique en cas de contrôle. L’Assurance Maladie a déjà sanctionné plusieurs cabinets pour ce motif, en réclamant des sommes rétroactives sur deux ans.
Les pansements sont une autre zone grise. Un pansement avec mèche correspond à AMI 4. Un pansement superficiel, même répété, reste AMI 2. Les agents de la CPAM exigent des preuves écrites dans le dossier patient (photo, description médicale, prescription) pour justifier la cotation supérieure.
Enfin, les actes nouveaux comme la téléconsultation assistée par IDEL ou le télé soin pansement (TMI 1,6) ajoutent de la complexité. Ces cotations sont valables uniquement si l’IDEL utilise une plateforme sécurisée agréée et si la prescription est conforme. Dans le cas contraire, l’acte peut être requalifié et rejeté.
En résumé, appliquer la NGAP, c’est penser comme un contrôleur CPAM : chaque cotation doit être traçable, justifiable et opposable.

Quelles règles de cumul sont autorisées ?
Le cumul d’actes est l’un des terrains les plus piégeux. La règle générale (NGAP, Titre XVI, dispositions générales) stipule qu’un seul acte est coté à taux plein, le suivant étant valorisés à 50 %, le 3ème gratuit sauf dérogation.
Exemple type : un IDEL réalise un pansement complexe (AMI 4) et une injection intramusculaire (AMI 1) lors de la même séance. Le cumul est autorisé, mais l’injection est réduite à 1,58 €.
La notion de séance est également déterminante. Si un IDEL passe deux fois dans la journée pour le même patient, certains actes doivent être regroupés. L’oubli de cette règle est l’une des principales causes d’indus.
Cas encore plus délicat : les actes techniques et actes de surveillance. Par exemple, le BSI ne peut pas être cumulé avec la surveillance hebdomadaire du patient diabétique insulino-traité (AMI 4), car la NGAP considère que nous avons dans ce cas deux actes de surveillances
💡 Pour limiter les risques, il est recommandé d’utiliser un logiciel métier validé par la CNAM, qui intègre les règles de cumul. Mais aucun logiciel ne remplace la vigilance professionnelle : en cas de litige, la responsabilité de l’IDEL reste entière.
Quelles majorations peuvent être appliquées ?
Les majorations constituent un complément de rémunération légitime, mais leur mauvaise application est l’une des principales sources d’indus.
La plus courante est la MCI (Majoration de Coordination Infirmière), valorisée 5 €, applicable dans le cadre d’une prise en charge coordonnée (pansements lourds et complexes, soins palliatifs). Mais elle n’est pas cumulable avec toutes les cotations et doit être tracée dans le dossier patient.
Les majorations horaires suivent un barème strict :
🔹 De 20 h à 8 h = majoration de nuit.
🔹 Dimanche et jours fériés
🔹 Actes pédiatriques (-7 ans) = majoration spécifique MIE.
Les indemnités kilométriques (IK) dépendent de la distance entre le domicile IDEL et celui du patient, calculée en kilomètres. Toute approximation ou absence de justification peut entraîner un rejet.
Un rapport de la CNAM en 2022 révélait que près de 30 % des rejets de facturation infirmière concernaient une mauvaise application des majorations. Or, bien utilisées, elles assurent une rémunération en phase avec la pénibilité réelle : soins de nuit, isolement géographique, suivi pédiatrique.
La règle clé : une majoration ne s’ajoute pas mécaniquement, elle doit toujours être justifiée et compatible avec l’acte coté.
Pour approfondir sur les règles de cumul et majorations découvrez notre article :
👉 Les règles de cumul et majorations 🔗
 

Quels sont les risques en cas d’erreur de cotation ?
Les erreurs de cotation exposent les IDEL à trois types de conséquences : financières, administratives et disciplinaires.
👉 Sur le plan financier, la CPAM peut réclamer le remboursement d’indus sur une période de trois ans. Certaines infirmières ont vu des redressements dépasser 15 000 €, suite à des cumuls interdits répétés.
👉 Sur le plan administratif, la facture est rejetée et le soin n’est pas payé. Une perte sèche qui s’ajoute à la charge de travail.
👉 Sur le plan disciplinaire, en cas d’erreurs systématiques, la CPAM peut déclencher une procédure de conciliation, voire saisir l’Ordre infirmier. Dans les cas graves, le conventionnement peut être suspendu.
La frontière entre erreur et fraude est ténue. Un IDEL qui facture une MCI systématique sans justificatif peut être accusé d’abus, même si son intention n’était pas frauduleuse. La meilleure défense reste la traçabilité : tout acte doit être justifié par la prescription et noté dans le dossier patient.
En clair, chaque cotation engage la responsabilité professionnelle de l’IDEL. Une erreur répétée peut coûter cher, non seulement financièrement, mais aussi en termes de crédibilité vis-à-vis des caisses et des patients. 
Pour en savoir plus, retrouvez notre article 👉 Les 9 erreurs fréquentes de cotation dans la NGAP infirmière 🔗
📚 Sources :
📌 Assurance Maladie – ameli.fr
📌 Haute Autorité de Santé – has-sante.fr
📌 Inspection Générale des Affaires Sociales (rapports publics) – igas.gouv.fr